Joli petit bouquet!!
C'est mon heure.
Maintenant, ce sera toujours l'étendue de mon heure.
Mais oui!
Je vais m'ouvrir.
Ce n'est pas la peine, vous, de tant pousser.
Je connais mon rôle. J'y suis préparée.
Des mois,
Que j'y travaille.
Permettez quand même qu'au dernier instant
Ca ne me soit pas rien de m'ouvrir sur l'espace,
La lumière.
Ce n'était pas si mal d'être larve de fleur,
De me tricoter ces couleurs avec du noir
En étant presque sûre de ne pas me leurrer
Sur la moindre nuance.
C'est très supportable, ce noir,
Quand on sait qu'on le trompe avec lui-même,
Que tout à l'heure
Il n'aura pas à se reconnaître
Dans ce qu'il a voulu
Et fait.
Patiente un peu,
Immensité du noir.
Tu vas pouvoir admirer ton travail.
C'est mon heure.
C'est maintenant que le noir me renie,
Me laissant seule dans le combat de mes couleurs
Avec ce qu'il y a de plus vorace.
Jusqu'à présent j'étais l'espoir d'être moi-même enfin.
Maintenant vient l'espoir de demeurer longtemps
Au bord de l'avenir,
Avant de pénétrer dans le flou de cette heure
Qui pour moi
Sera mon toujours.
Allons briller.
C'est l'heure.
Allons briller jusqu'à la chute.
Eugène Guillevic(né en 1907)
Trouées.